Quand des ar­tistes se consi­dèrent aussi en­tre­pre­neurs

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Pu­blié sur le site web du Ré­seau M, 11 fé­vrier 2019

On peut lire l’ar­ticle ici.

Fran­çois de Cour­val-Mil­lard di­rige de­puis 2012 la ga­le­rie d’art lan­cée par ses pa­rents, la Ga­le­rie 1040, rue Ma­rie-Anne, dans le Pla­teau Mont-Royal. Il a ré­cem­ment eu l’idée de lan­cer une en­tre­prise de pro­duits dé­ri­vés.

« J’avais pris l’ini­tia­tive de créer des évé­ne­ments à la ga­le­rie pour mous­ser le mar­ke­ting, et j’ai eu cette idée de com­mer­cia­li­sa­tion de pro­duits de dé­co­ra­tion in­té­rieure et de chaus­settes, dit-il. Je vou­lais dé­ve­lop­per des pro­duits qui rendent les gens heu­reux, qui met­traient de la cou­leur dans la vie des gens. J’avais com­mencé avec des chaus­settes, mais c’était un mar­ché sa­turé. Je me suis tourné vers la déco. »

Avec sa conjointe, par­te­naire dans l’en­tre­prise, le jeune homme conçoit cous­sins, ri­deaux, ac­ces­soires ves­ti­men­taires et autres pro­duits pour le bien-être chez soi. En oc­tobre de l’an der­nier, un sé­jour fa­mi­lial en France l’ins­pire à s’ou­vrir à ce mar­ché.

Il s’ins­crit tout au­tant à la Mis­sion France qu’au ser­vice de men­to­rat du Ré­seau M. Et il adore ça! « J’ai beau­coup d’idées pour le dé­ve­lop­pe­ment de la com­pa­gnie et mon men­tor m’écoute at­ten­ti­ve­ment, dit-il. J’ai de la mi­sère à me fo­ca­li­ser. L’exer­cice est très bé­né­fique sur ce plan : mon men­tor me pose les vraies ques­tions pour… me re­mettre en ques­tion! »

« La re­la­tion men­to­rale est bé­né­fique si vous évo­luez dans le monde des af­faires, parce qu’on a le sen­ti­ment d’avoir de l’écoute, ajoute-t-il. Peu de gens ont des pré­oc­cu­pa­tions d’en­tre­pre­neurs. Ou ils ne savent pas quoi vous ré­pondre quand vous vous confiez à eux. Ou ça ne les in­té­resse car­ré­ment pas ! Au contraire, un men­tor est très in­té­ressé, parce qu’il l’a vécu… »

M. de Cour­val-Mil­lard ne manque pas de tra­vail par les temps qui courent. Il dé­ve­loppe ses nou­veaux pro­duits tout en gé­rant la ga­le­rie, qui cé­lé­brait ses 25 ans l’an der­nier. On y a tourné plu­sieurs films et té­lé­sé­ries, comme Boo­me­rang ré­cem­ment, et les Beaux Ma­laises en 2014 et 2015 (no­tam­ment un épi­sode avec Ro­bert Le­page). « Même les Fran­çais peuvent voir ma ga­le­rie sur Net­flix grâce aux Beaux Ma­laises », dit-il en riant.

Dans le cadre de la Mis­sion France, il en­tend dé­ve­lop­per une col­lec­tion com­po­sée d’œuvres re­pro­duites sur des ri­deaux ou des cous­sins, en édi­tion li­mi­tée et nu­mé­ro­tée par l’ar­tiste. Chaque pro­duit sera ac­com­pa­gné d’un mes­sage per­son­na­lisé. « Ça per­met aux ar­tistes de bé­né­fi­cier de nou­veaux ca­naux de dif­fu­sion, ex­plique-t-il. Comme la ma­jo­rité des gens sont ur­bains, ils ont peu de murs pour ex­po­ser des œuvres qu’ils ont ache­tées, car elles doivent s’har­mo­ni­ser avec la dé­co­ra­tion. Les ar­tistes sont li­mi­tés par cette réa­lité. Les garde-robes sont pleines de ta­bleaux. L’es­pace manque. En dé­ve­lop­pant des œuvres sur tex­tiles, fa­bri­quées ici, dont l’édi­tion li­mi­tée main­tient une cer­taine va­leur, ça mousse la ré­pu­ta­tion de l’ar­tiste. Et je veux va­lo­ri­ser leur tra­vail en France. »

Faire son propre mar­ke­ting

Ma­rie-Chloé Du­val est jus­te­ment une des ar­tistes qu’en­tend mous­ser le pro­prio de la Ga­le­rie 1040. Voi­sine de la ga­le­rie, elle vou­lait jus­te­ment se faire connaître dans l’Hexa­gone. Pho­to­graphe, mais sur­tout peintre, elle pra­tique dif­fé­rents mé­dias, mais sur­tout l’acry­lique.

« L’art est une bu­si­ness, dit-elle. Que ce soit perçu comme du com­merce ne me gêne pas, du mo­ment que le ca­rac­tère ar­tis­tique n’est pas éva­cué. Si un ar­tiste est 100% fo­ca­lisé sur la qua­lité et l’au­then­ti­cité de son tra­vail, pour­quoi ne de­vrait-il pas se vendre? »

« Mon art doit sor­tir de mon stu­dio et re­joindre le pu­blic, dit-elle. Je dois donc mettre mon cha­peau d’en­tre­pre­neure et tra­vailler à mon image de marque. Je me pré­oc­cupe de de­sign, de style, de com­mu­ni­ca­tions. Je ne dis­pa­rais pas pen­dant des mois pour créer. J’écris aux clients ; je fais mes sui­vis. Quand je livre une œuvre, j’in­clus un cer­ti­fi­cat et une carte de re­mer­cie­ment. J’en­tre­tiens mon ex­pé­rience client. Quand j’ob­tiens une carte d’af­faires d’un client po­ten­tiel, je lui écris sans at­tendre d’avoir de ses nou­velles. »

Mme Du­val a com­mencé à peindre il y a cinq ans, entre son bac­ca­lau­réat et sa maî­trise en cri­mi­no­lo­gie. Elle en­vi­sa­geait même faire son doc­to­rat dans cette dis­ci­pline. Mais c’est la pein­ture qui l’a em­por­tée.

Elle est men­to­rée de­puis un an et consi­dère son men­tor sur­tout pas comme un coach. « Je suis cer­tain que vous l’avez en­tendu cent fois : quand tu es en af­faires, tu es seul, dit-elle. Mon men­tor m’a non seule­ment ap­porté de l’écoute, mais aussi un ré­seau. Beau­coup de gens gra­vitent dé­sor­mais au­tour de moi. On se sou­tient. On a tous soif de réus­sir. »

Elle ré­vèle que grâce au men­to­rat, elle a beau­coup ap­pris sur elle-même. Et aussi com­ment agir en so­ciété, au sein d’un groupe de per­sonnes, à avoir de la confiance en pu­blic.

« En tant qu’ar­tiste, je vois la France comme une contrée my­thique, dit-elle. C’est une culture forte, an­cienne, per­ti­nente. Ils ont une dy­na­mique ar­tis­tique plus tra­di­tion­nelle que la nôtre, mais elle est aussi très contem­po­raine. La France est la porte d’en­trée de l’Eu­rope, qui est un mar­ché de l’art très im­por­tant. »

Elle ai­me­rait ren­con­trer des mai­sons d’édi­tion ou des pro­duc­teurs de pro­duits al­coo­li­sés, pour leur pro­po­ser des œuvres qui fe­raient la cou­ver­ture de livres, de disques ou d’éti­quettes : « Plu­sieurs so­cié­tés cherchent à éta­blir un bran­ding plus jeune », dit-elle.

Ma­rie-Chloé Du­val tire beau­coup de sa col­la­bo­ra­tion avec Fran­çois de Cour­val-Mil­lard. « On s’en­traide, on se mo­tive, on couvre plus de ter­ri­toire à deux. Fran­çois évo­lue dans le mi­lieu de l’art. C’est très avan­ta­geux pour les ar­tistes. »

 

Cet ar­ticle est une col­la­bo­ra­tion de Sté­phane Des­jar­dins.

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