Le consommateur, grand perdant de l’achat de Transat par Air Canada

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Publié dans le Journal de Montréal/Journal de Québec, section Dans vos poches, 17 mai 2019

On peut lire l’article ici.

Le consommateur a très peu d’avantages à tirer de l’achat, pour 520 M$, d’Air Transat par Air Canada, si cette transaction est approuvée par les autorités.

Les monopoles ne sont jamais avantageux pour les consommateurs. Moins il y a de compétition dans un marché, moins l’offre est compétitive. Avec cette transaction, celle des transporteurs canadiens se rétrécit essentiellement à trois joueurs : Air Canada, WestJet et Sunwing.

  • Isabelle Dostaler, doyenne de la faculté d’administration à l’université Mémorial à Terre-Neuve était en entrevue à Dutrizac de 6 à 9:

En fait, 63 % des sièges offerts vers l’Europe à partir du Canada seront contrôlés par Air Canada, comparativement à 11 % par Air France-KLM, 6 % par WestJet et 21 % par les autres. C’est presque les deux tiers du marché ! Dans les destinations soleil, Air Canada contrôlera 46 % de la capacité, devant Sunwing (27 %).

En fait, le grand gagnant dans cette transaction, c’est Air Canada, qui acquiert beaucoup de pouvoir pour négocier avec les gouvernements, aéroports et autres fournisseurs de l’industrie du voyage.

Économies possibles

La transaction aura du bon pour les clients d’Air Canada, car le transporteur aura plus de latitude pour négocier avec ses fournisseurs et refilera assurément une partie des économies à ses clients.

De plus, les clients d’Air Transat auront probablement accès au programme de fidélisation Aéroplan. On verra cependant pour les conditions…

Prix en hausse à venir

Les prix vont-ils grimper ? À long terme, en 2020 ou 2021, fort probablement. Mais pas à court terme. L’intégration d’Air Transat au sein d’Air Canada prendra plusieurs mois et les ententes pour l’hiver prochain sont déjà scellées avec les fournisseurs.

En fait, Air Canada pourrait même être tentée de jouer sur les prix pour maintenir sa part de marché face à une WestJet désormais contrôlée par Onex. Et l’industrie aérienne est hyper compétitive, car de nombreux transporteurs étrangers sont actifs ici.

Par contre, une bonne part de la flotte d’Air Canada a vieilli, notamment pour les avions de Rouge, alors que ceux d’Air Transat, loués, sont pratiquement neufs. Air Canada va mettre à la retraite plusieurs avions et ne les remplacera pas, ce qui diminuera l’offre. Selon plusieurs experts, la capacité totale baissera, ce qui fera grimper les prix.

Vols avec escale à Toronto

Autre retombée possible : le nombre de liaisons directes entre Montréal et l’Europe va diminuer. Air Transat dessert des villes comme Zagreb, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Porto, Dublin, Malaga, Venise, Manchester, Lyon, Prague, Nantes, Glasgow, Lamezia, Barcelone, Faro, Malaga, Bâle. Air Canada, qui a souvent ses propres liaisons, va sûrement diminuer le nombre de ces vols directs. Pire : pour certains, il y a fort à parier que les Québécois devront faire escale à Toronto, où Air Canada a concentré une grande part de ses opérations (un « hub » dans le langage de l’industrie).

Plaintes

Air Canada et Air Transat ont souvent été critiquées pour les mauvais traitements infligés à leurs passagers (expulsions sauvages, clients forcés d’attendre des heures dans un appareil immobilisé, etc.), leurs compensations financières ridicules en cas de retard, les frais cachés, les pertes de bagages et le nombre de plaintes devant l’Office de la protection des consommateurs. Ça ne s’améliorera pas.

En février, le magazine Protégez-vous a publié son palmarès des meilleures compagnies aériennes. Air Canada, Air Transat, WestJet et Sunwing brillaient par leurs mauvaises notes. KLM, Air France et Lufthansa dominaient le classement. L’Office de la protection des consommateurs comptabilise les plaintes des transporteurs et de leurs filiales d’agents de voyage : Air Transat a eu 142 plaintes ces deux dernières années, contre 168 pour Air Canada, 142 pour Sunwing, 8 pour WestJet et 5 pour Porter.

Siège social à Montréal

C’est à prévoir : la promesse de maintien du siège social de Transat sautera dès qu’Air Canada traversera des turbulences. Et l’aéroport Montréal-Trudeau perd un levier de négociation important, ce qui l’affaiblit face à l’aéroport Pearson de Toronto. Le voyageur montréalais sera, ici aussi, désavantagé.

Comment faire face à la montée des prix ?

Le meilleur moyen est d’utiliser les sites et applications de comparaison de prix. La championne dans le domaine : Hopper. L’application québécoise de réservation de billets d’avion et de chambres d’hôtel prévoit 95 % du temps les prix des billets, jusqu’à un an à l’avance, et elle aurait permis des économies de 2,2 milliards à ses utilisateurs depuis son lancement, en 2015.

Sinon, repliez-vous sur Kayak, Skyscanner, Expedia, Google Flights ou Trivago.

Enfin, les agents de voyage ont souvent accès à des offres ou à une tarification plus avantageuse que celle offerte sur les sites web. Leur expérience du marché n’est pas à dédaigner. Et vous bénéficiez de la protection du Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyages.

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