Comment donner ou prêter de gros montants à ses enfants
Publié dans le Journal de Montréal/Journal de Québec, section Dans vos poches, 10 octobre 2023
Les parents s’y prennent mal lorsqu’ils veulent aider ou simplement gâter leur progéniture
Les chicanes familiales sont souvent générées par les dons ou les prêts que les parents font de leur vivant à leurs enfants. Et elles s’enveniment au moment de partager l’héritage.
Les motivations vous poussant à aider vos enfants sont légitimes : ils manquent d’argent pour financer leurs études ou s’acheter une maison, ils tombent malades, sont handicapés, sont aux prises avec des problèmes de toxicomanie ou de jeu… Parfois, ces réalités sont celles de vos petits-enfants.
Le problème, selon de nombreux conseillers financiers, c’est que les parents s’y prennent mal lorsqu’ils veulent aider ou simplement gâter leur progéniture. Très mal.
Nombreux sont ceux qui prennent des risques financiers ayant un impact sur leur train de vie à la retraite, au point de devoir dépendre financièrement de leurs enfants, parce qu’ils ont dilapidé une trop grande part de leur épargne.
D’autres font des dons importants de leur vivant et négligent de les déduire de l’héritage des bénéficiaires. On devine les chicanes qui en découlent…
Avant de prêter ou de donner un montant important, il faut obtenir une projection financière et un avis fiscal d’un conseiller financier, d’un comptable ou d’un fiscaliste.
De nombreux parents sont déchirés entre la volonté de rendre service et de faire signer des papiers ou d’engager des spécialistes. Vous n’aidez personne (ni vous, ni votre enfant, ni votre famille) si vous vous contentez de refiler de l’argent sans trace écrite.
Vous devez adopter une attitude de banquier.
Comment faire ?
S’il s’agit d’un prêt de plus de 2000 $, exigez que le bénéficiaire signe une reconnaissance de dette, ou un billet. Ce document doit préciser le capital, l’intérêt et un échéancier de remboursement précis, ainsi que des garanties (actifs saisissables) en cas de non-remboursement.
Pour éviter les chicanes, précisez dans votre testament que le don ou le solde non remboursé d’un prêt est déduit de la part de l’héritage du bénéficiaire. Gardez des preuves de remboursement (dépôts, reçus). Si le prêt est remboursé, signez une quittance.
Conseils
• Tenez un conseil de famille pour préciser vos intentions. La discussion permettra peut-être de trouver des solutions originales, qui vont satisfaire tout le monde. Invitez votre conseiller financier, qui jouera un rôle d’expert neutre.
• Les dons de moins de 75 000 $ aux enfants ne sont pas imposables pour les donateurs ou les bénéficiaires. Mais la disposition d’actifs entraîne un gain de capital imposable, y compris les dons en nature, comme celui d’un chalet ou d’un terrain. Les dons importants aux enfants mineurs sont particulièrement surveillés par le fisc.
• Un don est irrévocable : l’enfant en dispose à sa guise. Un don notarié le rend insaisissable dans certaines circonstances, notamment si le bénéficiaire a des problèmes financiers ou s’il divorce.
• Un prêt sur billet est prescrit trois ans après le dernier paiement de capital ou d’intérêt. Renouvelez-le par écrit, sinon, vous perdez votre argent.
• L’intérêt sur un prêt important pourrait être imposable. Dans certaines circonstances, pour plus de justice, un fiscaliste pourrait répartir la charge fiscale entre vous et le bénéficiaire. Un prêt hypothécaire sans intérêt n’a toutefois aucune incidence fiscale.
• Endosser un prêt pour son enfant vous rend solidairement et conjointement responsable, ce qui entraîne un risque pour vos finances personnelles et pour votre succession.
• Vous pouvez exiger que le don ou le prêt effectué à votre enfant soir exclu du partage en cas de rupture, par une clause dans son contrat de mariage ou de vie commune, dont vous conservez une copie.